« Notre patrimoine n'est pas réductible à Versailles, au Louvre, au Mont-Saint- Michel, à la basilique de Vézelay, ou au palais des Papes... Il est l'ensemble des biens que nous allons léguer aux générations futures, nos paysages, nos maisons, le dessin de nos villes, les bancs sur lesquels nos enfants iront s'asseoir, les rues dans lesquelles ils se promèneront, les places où ils se rencontreront.
Les touristes qui viennent par millions visiter nos villes ne les traversent pas en apnée, de leur hôtel aux monuments, en se bandant les yeux. Ils veulent goûter aussi à notre art de vivre et à la diversité extraordinaire de nos paysages. Préservons cette richesse. Empêchons son enlaidissement.
Il est temps que le respect de la beauté passée se double d'une exigence de la beauté à venir. Le «patrimoine» ne doit pas être seulement le mot sacré représentant d'un temps vertueux et révolu. Le soin consacré à certains espaces et monuments bien définis doit s'appliquer aussi à tout ce qui fait notre quotidien, le patrimoine de demain, les lieux collectifs, les transports publics, les zones périphériques, le mobilier urbain.
Des générations ont façonné le visage de la France. Pour éviter que la nôtre ne la défigure pour longtemps alors que le concert des intérêts à court terme est assourdissant, nous devons réveiller notre capacité à embellir notre pays. ».
À l'occasion des 30 ans des Journées du Patrimoine, Jack Lang sort de son silence pour s'indigner ouvertement de la laideur qui menace quotidiennement le territoire français. Celui qui avait lancé l'opération « Levez les yeux » pour sensibiliser les enfants à la beauté de leur patrimoine a décidé de pousser un « coup de gueule ».