Lucien Bonnafé est mort le 16 mars 2003. Ceux qui ont partagé son aventure ont tenté sur le vif de dire les chemins qu'il a ouverts. Folie, psychiatrie, poésie, politique, dans chacune de ces voies, Lucien Bonnafé a posé des paroles et des actes, comme autant d'invitations à poursuivre, chacun selon son style propre. Ce livre rassemble les textes de quelques-uns de ceux avec qui il a fait l'histoire et de quelques autres qui s'efforcent de la prolonger. Ce livre évoque une oeuvre pionnière, qui a marqué l'horizon des pratiques de la folie, dont la méthode et l'éthique se soutiennent d'un concept original : le désaliénisme.
Peut-on encore parler de traumatisme ? La question mérite d'être posée tant le mot est galvaudé aujourd'hui et qu'il autorise les idéologies les plus diverses, les pratiques les plus contradictoires. Ce que ce mot banalisé implique et conforte c'est bien sûr l'empire de la "psychologie", même si elle se présente volontiers parée de concepts issus de la psychanalyse.Il fallait aborder la critique de certaines pratiques qui s'autorisent de ce discours sur le traumatisme.
Dans la situation de l'exil et de double appartenance culturelle, comment concilier le respect des traditions et la prise en compte d'un système juridique, économique et social d'une autre culture ? L'inhibition ne peut-elle être alors une des tentatives pour répondre à ce dilemme ? Ce colloque a été l'occasion d'une rencontre entre psychanaliste antillais, maghrébins et français.
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Les pratiques de la folie sont des pratiques sous contrainte : contrainte de la langue, contrainte de la cité qui désigne par folie ce dans quoi elle ne se reconnaît pas ; contrainte des lois, obligations de soins qui certes enserrent la clinique, mais n'en rendent que plus vive pour chacun la question de l'acte dans le transfert. Il faut beaucoup de civilité pour se tenir dans la conséquence de certains actes : les " actes de folie " mettent la communauté à cette épreuve. Trois textes prolongent ce regard sur les pratiques en proposant d'entrer dans les institutions elles-mêmes, dans le quotidien du travail avec la folie.
La folie n'est plus d'actualité : sa figure inquiétante s'est dissoute dans les savoirs modernes. En est-on si sûr ? L'autisme par exemple n'est-il pas folie de la communication, la pédophilie folie du sexe ? Il serait plus pertinent de dire que la folie est toujours inactuelle. La polyphonie de cet ouvrage tente d'en rendre compte, en s'interrogeant sur le rapport entre le lien social tel qu'une époque le construit et les catastrophes subjectives qui témoignent des points d'effondrement.
La modernité prétend révolue l'époque du sacrifice, rejeté dans les limbes de la pensée primitive. A l'inverse, il est exigé toujours plus de sacrifices au nom de l'économie, de la raison, du bien dans les institutions comme dans le corps social. S'agit-il d'une simple mutation de discours ou plutôt d'un déni de ce qui fonde le rapport de l'homme au sacré, l'enjeu symbolique du lien social ?