" Établir une limite " est l'un des concepts majeurs de la pensée de l'espace-temps japonais, l'une des racines de son esthétique. Dans les sanctuaires et les maisons, cette notion du seuil, du kekkai, conduit l'agencement de la charpenterie et des ouvertures, tout en guidant la conception des jardins, des paysages, de la peinture, intimement liée à la littérature, aux rites ou à la poésie.
En 1966, en pleine furie moderniste, un historien japonais, éminent spécialiste de la maison médiévale, Itō Teiji, publie une œuvre majeure consacrée au kekkai, qui puise ses exemples dans toute l'histoire de l'architecture japonaise. C'est ce livre, Kekkai no bi, que Philippe Bonnin et son équipe traduisent, rendant accessible pour la première fois cet ouvrage essentiel. L'abondante iconographie permet en outre de visualiser les lieux et les dispositifs évoqués, tandis que l'appareil de notes et de commentaires, la chronologie et les cartes en font un outil de travail très commode et solidement étayé.
Une invitation à nouer le kekkai et à entrer dans un univers sensible et complexe qui intrigue et fascine toujours l'Occident.
En quoi consiste l'inceste ? Est-il l'objet d'une prohibition universelle ? Cette interdiction concerne-t-elle les seules parentés " biologiques " ou s'étend-elle aux diverses parentés " sociales ", comme celles qui se tissent aujourd'hui dans les familles dites recomposées mais qui existent aussi dans beaucoup d'autres sociétés ?
Cette prohibition joue un rôle fondamental dans le fonctionnement des multiples systèmes de parenté étudiés de par le monde. Mais d'où vient-elle ? Peut-on penser, avec Claude Lévi-Strauss, que l'interdit de l'inceste marque à lui seul le passage de la nature à la culture ? Et comment comprendre, alors, la tension persistante entre l'interdit proclamé, institutionnalisé, et la pratique incestueuse qui, partout, demeure ?
Voyage dans l'espace et dans le temps, cette réflexion met en évidence un fait essentiel, le caractère spontanément asocial et indifférencié de la sexualité humaine et la nécessité d'une régulation sociale de cette spontanéité. Il met ainsi en lumière les principaux enseignements de l'anthropologie sur la question de l'inceste, fait social majeur et aujourd'hui d'une actualité brûlante.
À Badiraguato, commune rurale et marginalisée du Mexique, le maire a fait édifier avec enthousiasme un belvédère où, à la manière de la colline de Hollywood, se détachent de monumentales lettres qui surplombent le paysage. Il faut dire que le village, au cœur de la région escarpée du Sinaloa, a été mis en scène sur les écrans du monde entier par une série Netflix revenant sur les pas des plus célèbres " Narcos " mexicains, Joaquín
El Chapo Guzman et Rafael Caro Quintero. Il est aussi l'épicentre d'une " guerre contre la drogue " qui a fait plus de victimes depuis le début du XXIe siècle que les conflits en Afghanistan ou en Irak.
Mais comment vivent au quotidien celles et ceux qui restent invisibles dans cette grande fresque, qui subsistent dans cette région sans emplois, qui tiennent une épicerie, cultivent une petite parcelle ou occupent un poste dans l'administration locale ? De quelles manières se déplace-t-on dans cet espace enclavé où une mauvaise rencontre peut surgir à tout instant ? Qui sont les producteurs de pavot, coincés entre la répression militaire et l'exploitation de ceux qui achètent leur récolte ? Qu'est-ce qu'être une femme dans un lieu suspendu à la violence des hommes ? Et comment donner sens aux meurtres qui rythment le quotidien ?
En se situant au plus proche des logiques d'action des personnes, cette ethnographie sensible lève le voile sur une zone interdite qui est l'envers de notre économie globalisée ; l'enquête anthropologique nous fait toucher du doigt l'incertitude qui règne lorsque, une nouvelle fois, " l'aube s'est levée sur un mort ".
Crêtes multicolores, vestes à clous, pantalons issus de surplus militaires, bouteilles de bières entassées, No Future, voix et musique saturées rythmant le pogo d'une foule bariolée : le mot " punk " charrie à lui seul son lot d'images toutes faites. Par-delà les clichés, comment ce style musical venu de New-York et de Londres s'est-il implanté en France ? Si le mouvement punk connaît son âge d'or dans les années 1980, avant d'être supplanté sur la scène médiatique par d'autres musiques contestataires, il n'en demeure pas moins prégnant dans certains espaces sociaux et géographiques. Mais qui devient punk ? Où ? Comment ? De quelle vision du monde cette musique est-elle le vecteur ? En quoi est-elle aussi un mode de vie, placé sous le signe du Do It Yourself, qui offre un point de vue décalé sur la société française et ses évolutions ?
Pour comprendre les multiples facettes du punk et retracer son histoire, cette enquête au long cours mobilise tous les outils de la sociologie : observation participante, analyses statistiques, entretiens et suivi dans la durée de nombreuses trajectoires individuelles d'amateurs comme de musiciens. Ouvrant les portes d'un monde à part, elle parvient de la sorte à reconstituer les logiques sociales expliquant la genèse, l'organisation et la persistance d'une musique qui est aussi un style de vie.
" Chacun sait que la publicité cible prioritairement notre cerveau reptilien. " L'affirmation issue des colonnes d'un grand quotidien français témoigne du succès de la notion proposée par le neuroscientifique américain Paul D. MacLean au tournant des années 1960. Elle s'inscrit dans une théorie générale du cerveau qui rapporte à une part archaïque de notre héritage évolutif un ensemble d'attitudes " primaires " : instinct sexuel, défense du territoire, agressivité...
Tôt considéré comme erroné puis obsolète sur le plan scientifique, le " cerveau reptilien " n'en a pas moins connu une formidable carrière, retracée ici dans une enquête qui conjugue une étude de sa formulation, des analyses de ses circulations ou réappropriations – d'Arthur Koestler à Michel Onfray, en passant par Alain Resnais – et une ethnographie de certains cercles thérapeutiques invitant aujourd'hui encore, pour vivre mieux, à accepter le " crocodile " dissimulé en nous.
Pourquoi et comment se diffuse une théorie fausse ? Cas limite, le " cerveau reptilien " permet d'envisager à nouveaux frais la question de la diffusion des savoirs dans la culture, et ainsi des rapports entre science et société.
Le concept de " choc des civilisations " est devenu un lieu commun lorsqu'il s'agit de parler de géopolitique, de religion ou d'identité nationale. Raphaël Liogier nous montre que ce n'est qu'un leurre face à la réalité de la civilisation globale née de l'intensification des échanges planétaires. Les usages techniques, les pratiques alimentaires et les cursus universitaires se sont uniformisés. Images, musiques et émotions font désormais le tour de la planète. En dépit de l'existence de postures antagonistes et extrémistes qui peuvent s'appuyer sur des idéologies religieuses et politiques, les croyances essentielles des hommes sont de moins en moins des facteurs d'oppositions de valeurs. L'ensemble des religions sont, à des degrés divers, traversées par trois tendances nées de la mondialisation : le spiritualisme, le charismatisme et le fondamentalisme. Ce qui n'empêche pas qu'au sein de cette civilisation unique les disparités socio-économiques abyssales et les angoisses identitaires contagieuses génèrent des formes de violence inédites caractéristiques, entre autres, d'un nouveau terrorisme. Raphaël Liogier lance un appel pressant à penser la porosité des frontières et la disparition de la figure de l'Autre radical, l'étranger qui se situait jadis au-delà de notre espace de vie. Comment les identités individuelles et collectives peuvent-elles se définir et coexister dans un monde sans vraies frontières ? Un essai vigoureux pour combattre les préjugés, et mieux comprendre le monde qui nous entoure.
L'intime est une expérience de familiarité avec une personne, un animal, un lieu qui progressivement se transforme en lien. Expérience fragile, le plus souvent soustraite au regard, et qui passe presque pour insignifiante face aux tumultes de la passion amoureuse, elle constitue pourtant une part essentielle de nos existences. Or elle peut se révéler déroutante, en venant brouiller les frontières de l'intérieur et de l'extérieur, du sujet et de l'objet, du visible et de l'invisible, du dicible et de l'inexprimable.
Si bien que l'intime semble échapper à toute entreprise de connaissance : comment dès lors penser l'intime ? Interrogeant avec acuité et délicatesse cette part équivoque de nous-mêmes et ses évolutions dans des sociétés aussi diverses que le Brésil, le Japon et la France, François Laplantine nous invite à explorer les linéaments multiples mais aussi les ressources de l'imaginaire tant politique qu'artistique de la vie intime.
L'urbanisation gagne inexorablement la planète entière. Ces formes de regroupements humains ont un point commun : les rues. Ce sont elles que ce dictionnaire encyclopédique honore en s'attardant sur le sens des mots qu'elles murmurent à l'oreille des passants.
L'urbanisation gagne inexorablement la planète entière. Ces formes de regroupements humains ont un point commun : les rues. Ce sont elles que ce dictionnaire encyclopédique honore en s'attardant sur le sens des mots qu'elles murmurent à l'oreille des passants.
Les notices sont sagement classées par ordre alphabétique, d'" Abribus " à " Zone " en passant par " Asphalte ", " Barricade ", " Carnaval ", " Dérive ", " Jardin ", " Métro ", " Mobilier urbain ", " Pavé ", " Taxi ", " Toilettes publiques ", " Trottoir "...
Outre la géohistoire étymologique, l'auteur mobilise les travaux d'historiens, d'architectes, d'anthropologues et de géographes, tout en prêtant attention aux réactions des flâneurs, poètes, romanciers et cinéastes.
Paris, 2015 : le terrorisme djihadiste touche massivement la capitale française et fait près de 150 morts. Pour qualifier les auteurs de ces meurtres, on parle tantôt d'hommes radicalisés soumis à une idéologie, tantôt d'hommes médiocres, " banaux ", qui ne font qu'obéir aux ordres, tantôt de monstres assoiffés de sang. Comme pour les tueurs de masse des plus grands crimes de l'histoire contemporaine, on se demande sans cesse qui sont ces hommes capables de tuer ainsi à la chaîne. Qu'éprouvent-ils dans leur conscience ? Ne ressentent-ils pas l'horreur de
leurs actes ? N'ont-ils pas de la compassion pour leurs victimes ?
Pour Richard Rechtman, ce ne sont pas les idéologies qui tuent, mais bien les hommes. Ceux-ci s'en chargent avec une grande facilité, et tuent simplement comme d'autres vont au travail. Ce livre effectue une véritable descente dans la vie ordinaire des petits exécutants, des génocidaires. Il sonde le quotidien dans lequel les hommes s'accommodent d'exécuter chaque jour des dizaines d'individus. Il montre que ce n'est pas le fait de tuer qui occupe l'essentiel de leurs pensées, mais plus simplement leur vie quotidienne. Ils tuent comme ils s'attelleraient à n'importe quel métier, c'est-à-dire de façon ordinaire. Car ce ne sont pas les plus motivés ou les plus sadiques, ni même les plus endoctrinés, qui tuent avec une telle facilité, ce sont avant tout les hommes les plus disponibles.
L'objet de ce livre n'est donc pas de savoir qui sont ces exécuteurs ni au nom de quoi ils tuent, mais de montrer comment dans certains contextes, exécuter d'autres hommes constitue la vie ordinaire de tueurs anonymes.
Alchimies festives, culte du plaisir, retour en puissance des affects et des émotions : Eros triomphe, et nous enseigne que la profondeur se cache toujours à la surface des choses, dans la banalité de notre quotidien. Triomphe de la raison sensible sur le vieux rationalisme scientiste, du vouloir- vivre collectif sur l'individu, de la joie dionysiaque sur les morales arides qui stérilisent l'action. Triomphe des pulsions et de l'imaginaire sur le progressisme empesé de nos élites et la pruderie de nos bien-pensants. Attentif aux humeurs et aux enthousiasmes sécrétés par le corps social, cernant au plus près les vibrations du monde, Michel Maffesoli signe une oeuvre essentielle, aboutissement de trente ans de réflexion, livre-manifeste qui chante l'éternelle jeunesse du monde et annonce une rupture épistémologique destinée à renouveler en profondeur les conditions de la pensée philosophique.
La grande muraille verte est un projet révolutionnaire mis en place par les pays africains du Sahel : une bande végétale de 15 km de large, traversant le continent d'est en ouest, dont l'objectif est de combattre la désertification grâce à une gestion durable des ressources naturelles.
La grande muraille verte est un projet révolutionnaire mis en place par les pays africains du Sahel : une bande végétale de 15 km de large, traversant le continent d'est en ouest, dont l'objectif est de combattre la désertification grâce à une gestion durable des ressources naturelles. Cela ne peut se faire sans de nombreux acteurs, chercheurs, médecins, citoyens et populations locales. La désertification d'un milieu s'accompagnant toujours d'une perte de biodiversité, il s'agit de rétablir une grande variété d'espèces, animales comme végétales, pour permettre le retour à l'équilibre écologique. Mais comment faire dans un environnement où la pluviométrie est très faible ? Quelles espèces, ou association d'espèces, choisir ? Quels sont les impacts sur les populations ? Dix ans après la mise en place du projet, où en est-on ?
C'est à la découverte de cette expérience hors du commun, soutenue par l'université Cheikh Anta Diop de Dakar et le CNRS, que nous invite cet ouvrage.
Du delta du Mékong aux chutes d'Iguaçu, de la côte néo-zélandaise à la mystérieuse Persépolis, ils avancent, sac au dos, ticket à la main et téléphone portable en guise d'appareil photo : ils sont les nouveaux explorateurs de l'espace mondial, occidentaux depuis longtemps, maintenant chinois ou russes, demain nigérians, un jour peut-être nord-coréens...
Du delta du Mékong aux chutes d'Iguaçu, de la côte néo-zélandaise à la mystérieuse Persépolis, ils avancent, sac au dos, ticket à la main et téléphone portable en guise d'appareil photo : ils sont les nouveaux explorateurs de l'espace mondial, occidentaux depuis longtemps, maintenant chinois ou russes, demain nigérians, un jour peut-être nord-coréens...
Ils sont les touristes internationaux : 800 millions chaque année à parcourir le monde après l'avoir rêvé. Confrontés à la monotonie des artefacts que l'industrie touristique répète à l'infini sur des circuits toujours plus balisés, beaucoup d'entre eux rêvent d'espaces à l'écart, d'" authenticité ", de rencontres avec des sociétés " préservées ". Mais comment échapper à la canalisation des flux et au marketing des agences de voyage qui adaptent sans cesse leur stratégie à cette soif de dépaysement ?
C'est cette tension, à la fois humaine, culturelle et spatiale, qu'interrogent Thomas Daum et Eudes Girard. Écolodges, écotourisme, cabanes " tout confort ", gîte à la ferme, tourisme " citoyen " ou " humanitaire ", mise en scène de soi à travers les blogs de voyage... Autant de nouvelles pratiques révélant l'" illusion du local ", la soif inextinguible de décentrement qui tenaille l'imaginaire et les fantasmes du touriste mondialisé.
Sociologue hors normes, Norbert Elias, né en Allemagne en 1897, mort aux Pays-Bas en 1990, est considéré comme l'un des plus grands représentants de sa discipline, à l'égal de Weber, Durkheim ou, plus tard, Bourdieu. Ayant dû fuir l'Allemagne nazie pour la France puis la Grande-Bretagne, il a attendu l'âge de la retraite pour voir son œuvre enfin publiée et reconnue. Introduite tardivement en France dans les années 1970, elle commence seulement à bénéficier de la reconnaissance internationale et pluridisciplinaire qu'elle mérite, tant auprès des sociologues que des psychologues, historiens, politistes et anthropologues. Rendre sa pensée plus accessible en en dégageant les motifs souterrains, et en dissipant quelques-uns des malentendus dont elle a pu pâtir, tel est le premier objectif de cet ouvrage. Quelques études de cas dans divers domaines illustrent la fécondité de ses apports : la question de l'authenticité, la notion d'élite, le statut d'artiste dans la modernité et le rôle de l'excitation dans les spectacles sportifs et la consommation des œuvres de fiction. Une courte postface propose un commentaire plus personnel sur la vie exceptionnelle d'un penseur hors du commun.
Mai-Juin 68 : la contestation saisit des pans entiers de la société française, des lycéens aux étudiants, des ouvriers aux employés, des cadres aux acteurs de la culture. Facultés, usines, institutions occupées se transforment en une immense scène où tout est passé au
crible de la critique : exploitation, aliénation, gaullisme, normes sociales, hiérarchies, domination, autorité.
Mai-Juin 68 : la contestation saisit des pans entiers de la société française, des lycéens aux étudiants, des ouvriers aux employés, des cadres aux acteurs de la culture. Facultés, usines, institutions occupées se transforment en une immense scène où tout est passé au
crible de la critique : exploitation, aliénation, gaullisme, normes sociales, hiérarchies, domination, autorité. Cette gigantesque prise de parole est marquée par une créativité inédite. " Tous créateurs ! ", dit d'ailleurs un slogan, " Écrivez partout ", renchérit un autre. Roland Barthes célèbre la " parole sauvage " de Mai, Michel de Certeau observe qu'" une foule est devenue poétique ". Difficile pour les écrivains, en particulier d'avant-garde, de rester à l'écart de ce grand ébranlement de l'ordre symbolique...
C'est à ces avant-gardes littéraires qu'est consacrée l'étude de Boris Gobille. Durant ces semaines de fièvre, elles descendent dans la rue, multiplient les prises de position publiques, forment des collectifs et expérimentent de nouvelles articulations entre écriture et " révolution "... Autant d'enjeux explorés dans cet ouvrage qui revisite la question de l'engagement de la littérature et de la responsabilité des écrivains face aux événements politiques de leur
temps. On y croisera des surréalistes, des existentialistes, des structuralistes, des communistes, des " gauchistes ", des revues comme Tel Quel, Change, Action poétique, Les Lettres Françaises, La Nouvelle Critique, mais aussi Sartre, Beauvoir, Aragon, Sollers, Faye, Roubaud, Pingaud, Blanchot, Duras, Mascolo – parmi tant d'autres plus ou moins obscurs, plus ou moins renommés, tous acteurs de cette singulière aventure qui vit les écrivains s'emparer de 68 et 68 s'emparer des écrivains.
Un sage chambertin qui évoque un sous-bois de feuillus un soir d'automne, un bandol qui nous fait sentir la garrigue chauffée par le soleil du Midi, un champagne qui nous rappelle un corps aimé. Il est peu de matières, d'aliments qui suscitent un tel émerveillement, une telle passion et qui sont aussi ancrés dans notre société. Le vin fait partie de notre histoire, de notre civilisation et de notre culture. Face à la montée de la prohibition qui privilégie le principe de précaution plutôt que l'apprentissage d'une consommation responsable, il fallait revenir sur notre relation complexe et paradoxale au vin, sur ses origines, ses liens avec la religion, la santé, l'éducation, le politique... Et sur sa contribution éclatante au rayonnement de la France dans le monde.
En janvier ¬1935, Deborah Lifchitz et Denise Paulme quittent Paris pour le village dogon de Sanga, au Mali, où elles vont effectuer une mission ethnographique de neuf mois. Cette mission a donné lieu à de nombreuses publications scientifiques, mais aussi à une importante correspondance dont nous ne connaissions jusqu'à présent qu'une partie. Dans cet ouvrage sont désormais réunies toutes les lettres, retrouvées dans différents fonds d'archives, que les deux ethnologues ont échangées avec André Schaeffner, Michel Leiris, Georges Henri Rivière ou Marcel Mauss au cours de leur séjour sur le terrain. Riches d'informations sur la personnalité de Deborah Lifchitz et Denise Paulme, ces lettres éclairent aussi les relations qu'elles ont entretenues avec leurs informateurs, amis, collègues, maîtres ou parents, les liens que ceux-ci ont noués entre eux, le contexte institutionnel et les enjeux théoriques de la discipline ethnologique en train de se former. Mais ces " lettres de Sanga " ne sont pas seulement sources d'informations historiographiques ; elles doivent également être envisagées en elles-mêmes, comme une sorte de viatique qui a permis à deux jeunes femmes d'affirmer leur vocation scientifique et de faire profession d'ethnologue.
La perception de l'arc-en-ciel est-elle universellement DE L'ANTHROPOLOGIE partagée ou propre à chaque culture ? Depuis les travaux fondateurs de Newton, la tradition occidentale considère l'arc-en-ciel comme un composé de sept couleurs (rouge, orange, jaune, vert, bleu, violet, indigo) issu de la décomposition prismatique et continue de la lumière.
La perception de l'arc-en-ciel est-elle universellement DE L'ANTHROPOLOGIE partagée ou propre à chaque culture ? Depuis les travaux fondateurs de Newton, la tradition occidentale considère l'arc-en-ciel comme un composé de sept couleurs (rouge, orange, jaune, vert, bleu, violet, indigo) issu de la décomposition prismatique et continue de la lumière. Pourtant, dès 1810, Goethe, avec sa Théorie des couleurs, vient critiquer ce modèle, pour prendre en compte la subjectivité du regard. Dans son sillage, les Romantiques accusent Newton d'avoir " détruit la poésie de l'arc-en-ciel, en le réduisant aux couleurs prismatiques ".
Se défaire d'une théorie dominante afin de considérer d'autres types d'expériences et de perceptions : tel est l'objectif de cet ouvrage qui invite à découvrir une variété d'arcs-en-ciel extra-européens, de l'Antiquité à nos jours. L'enquête révèle que, dès lors que l'on s'écarte des sociétés européennes des derniers siècles, les liens entre arc-en-ciel et couleurs s'établissent selon des modalités différentes : nombre d'arcs-en-ciel sont trichromes, monochromes, voire incolores. En Égypte, en Mésopotamie, en Grèce ancienne, en Éthiopie ou en Mélanésie, les couleurs de l'arc-en-ciel se déclinent ainsi selon des configurations bien éloignées du modèle newtonien. Ces dernières nous renseignent sur la façon dont chaque société envisage le chromatisme.
Quelles sont les conditions nécessaires pour colorer un arc-en-ciel ? Quelles représentations culturelles entourent l'apparition de ce phénomène météorologique ? Quels défis les arcs-en-ciel posent-ils pour la mise en images ? Voici les principales questions auxquelles ce livre se propose de répondre.
L'Internationale situationniste naît en 1957 de la rencontre entre plusieurs collectifs d'artistes européens, avant de se transformer au cours des années 1960 en groupe révolutionnaire. Elle est aujourd'hui reconnue comme l'une des dernières incarnations du modèle des " avant-gardes historiques ". Son principal penseur, Guy Debord (1931-1994), a été intronisé après sa disparition comme l'une des figures majeures des arts et de la philosophie politique des années 1950-1960. Première analyse sociologique du mouvement situationniste, cette histoire éclaire les parcours croisés des acteurs qui l'ont animé, décrypte leur relation à l'art et aux institutions artistiques, à la pensée marxiste et aux intellectuels, à la politique et au militantisme. En prenant parti pour une mise au jour lucide des pratiques et idées situationnistes, Éric Brun renouvelle notre connaissance des avant gardes, de leurs formes de politisation et d'internationalisation, et engage une réflexion sur les apports et limites de ce courant subversif qui n'ambitionnait rien moins que d'établir une nouvelle civilisation. Une contribution majeure pour comprendre le rôle des artistes dans la contestation révolutionnaire et celui des " situs " en Mai-Juin 1968.
C'est Marcel Mauss au travail que nous présente Jean-François Bert, au terme d'une enquête fondée sur les archives de l'anthropologue : saisi sur le vif dans la rédaction de ses comptes rendus pour L'Année sociologique, ses lectures en bibliothèque, l'édition posthume de ses collègues comme Henri Hubert ou Robert Hertz, ou encore la mise en forme de son fichier. Autant de pratiques savantes mobilisées dans la production, la diffusion et la réception d'un savoir, celui des sciences sociales alors en constitution. Le lecteur suit les traces des activités de l'anthropologue au croisement de la sociologie, de l'anthropologie et de la philologie. Les grandes étapes de sa vie, son travail quotidien à L'Année sociologique, ses candidatures au Collège de France, la rédaction de ses articles les plus importants ou ses rapports avec son oncle Émile Durkheim sont ici revisitées à partir d'une attention portée aux manières de faire, aux faits et gestes du savant, mais aussi aux rites et aux genres du savoir de la fin du XIX¬ ¬e et du début du XX¬¬e siècle. L'atelier de Marcel Mauss nous fait découvrir l'image d'un chercheur plus contrastée que celle donnée par les biographies classiques. Un atelier, surtout, qui permet de mieux comprendre l'apport de l'anthropologue à une science en devenir.
Préface de Patrice Bourdelais L'étude des questions liées à la santé est forcément interdisciplinaire. Les approches environnementales, anthropologiques, médicales et sociales doivent être croisées et coordonnées si l'on veut aboutir à des résultats novateurs prenant en compte toute la complexité des phénomènes sanitaires. Cet ouvrage décrit et analyse les relations complexes entre état de santé et environnements spécifiques (urbains, sahéliens...), dynamiques sociales, changements climatiques, modification des paysages et des systèmes agronomiques ou sylvo-pastoraux, évolutions socio-démographiques et urbanisation, changements des comportements alimentaires et des modes de vie, modification des pathologies, transformations de la structure familiale et des liens socio-affectifs, vieillissement de la société. Un panorama complet de la gestion de la santé en Afrique de l'Ouest.
Les écrits de Michel Foucault sont stratifiés, hiérarchisés, entre les livres, les entretiens et les cours au Collège de France, mais ils sont surtout disséminés dans leurs usages. Désormais, et en plus de l'histoire des sciences et de la philosophie, les « effets » Foucault sont palpables sur la théorie de la littérature et du cinéma, l'histoire culturelle et sociale, les théories du genre, la pensée politique, les sciences de gestion... C'est dans ce chantier ouvert que se situe cet ouvrage. Il s'agit pour Jérôme Lamy, Jean-François Bert et leur équipe de spécialistes de resituer et d'analyser une pensée empruntant des questionnements à d'autres champs, de la psychologie à l'économie, de la science politique à la géographie, tout en ne se réclamant pas de ces sciences humaines et sociales. Pour comprendre la position de Foucault, les grands axes méthodologiques qu'il a parcourus sont retracés, telle l'archéologie, l'épistémè, la problématisation. Les concepts, des ouvrages maintenant classiques aux cours et à l'histoire de la sexualité, sont également revisités. Cette lecture critique des écrits et des usages de Foucault permet de le confronter aux analyses les plus récentes en sciences sociales, comme les postcolonial studies, ou de suivre les dialogues engagés (parfois à distance) avec des auteurs comme Norbert Elias, Michel de Certeau et Pierre Bourdieu. Un inventaire aussi rigoureux qu'éclairant.
L'étude d'un mythe des origines, celui de l'île où ne vivent que des femmes, nous transporte de la Chine archaïque, Taiwan et l'océan Pacifique aux églises romanes, en passant par les tribus amérindiennes et sibériennes, puis les routes de la soie, pour remonter à la naissance du jade en Mongolie intérieure il y a 8 000 ans. Pourquoi ? Parce qu'avant la multiplication des cliniques et des hôpitaux, accoucher signifiait risquer la mort en donnant la vie, terrible raccourci de la condition humaine, fondamentale épreuve du couple. Aussi prégnante qu'omniprésente, cette thématique permet de retracer le peuplement originel de l'Asie, du Pacifique, des Amériques. D'accompagner les maîtres d'astres et de navigation polynésiens capables de vaincre le tiers liquide du globe grâce à une connaissance intime de la nature. De planer avec l'aigle des chamanes navajo, migrer avec les cygnes d'Asie centrale. L'immense érudition de Serge Dunis, puisant aux sources les plus diverses – anthropologiques, historiques, maritimes, naturalistes –, alliée à ses talents de dessinateur, permet de revivre cette épopée.
À Séville de grands rituels mobilisant l'ensemble du corps social se succèdent tout au long de l'année : semaine sainte, ouverture de la saison des corridas, feria, pèlerinage de Rocío et Corpus Christi. Flamboyantes et exotiques, ces célébrations d'un catholicisme populaire exercent sur quiconque y porte un regard une forme de fascination. Du meurtre de Notre Père Jésus lors de la semaine sainte à la pulsion du désir retrouvé et maîtrisé lors de la corrida de resurrección, à la feria qui célèbre l'émergence de la parenté, au rapt de la Vierge en Mère à laquelle le pèlerin doit finalement renoncer, et enfin, à la consommation festive du corps de Notre Père Jésus : le peuple andalou construit, au moyen de ses rituels, une scénographie originale du triangle œdipien. La Passion selon Séville procède ainsi par clivage entre la mise en scène du mythe et la mise en acte du rite qui suggère un autre récit, non explicité, celui de l'inconscient. Par une description fine et vécue des processions et des célébrations sévillanes, ainsi que par une très riche iconographie, Antoinette Molinié nous donne à voir un christianisme vivant et incarné. Combinant de manière novatrice une approche structuraliste et des outils freudiens, elle propose une analyse des grands rites de notre culture dans leur spécificité andalouse.
Contre le rationalisme désuet, l'économicisme triomphant, le progressisme incantatoire et l'inauthenticité de ses formules creuses, Michel Maffesoli chante l'infinie tendresse du monde et nous rappelle que le sentiment tragique de la vie s'accorde à l'Ordre des choses. Dans ce nouvel essai, le théoricien de la postmodernité arpente avec bonheur la pensée sociologique, scrute les vibrations du vivre-ensemble et insiste sur l'opposition entre la puissance horizontale sécrétée par la sagesse populaire et la rigidité du pouvoir vertical, venant de Dieu ou des idéologies monothéistes. La postmodernité en gestation se situe résolument à l'ombre de Dionysos, divinité de la nature et des effervescences collectives. Comment comprendre cette irruption de la passion dans la vie quotidienne ? Comment donner sa place à ce retour de l'idéal communautaire ? Quelle méthode suivre pour comprendre ce changement de paradigme ? Un antidote philosophique au pessimisme ambiant. Contre le rationalisme désuet, l'économicisme triomphant, le progressisme incantatoire et l'inauthenticité de ses formules creuses, Michel Maffesoli chante l'infinie tendresse du monde et nous rappelle que le sentiment tragique de la vie s'accorde à l'Ordre des choses. Dans ce nouvel essai, le théoricien de la postmodernité arpente avec bonheur la pensée sociologique, scrute les vibrations du vivre-ensemble et insiste sur l'opposition entre la puissance horizontale sécrétée par la sagesse populaire et la rigidité du pouvoir vertical, venant de Dieu ou des idéologies monothéistes. La postmodernité en gestation se situe résolument à l'ombre de Dionysos, divinité de la nature et des effervescences collectives. Comment comprendre cette irruption de la passion dans la vie quotidienne ? Comment donner sa place à ce retour de l'idéal communautaire ? Quelle méthode suivre pour comprendre ce changement de paradigme ? Un antidote philosophique au pessimisme ambiant.