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Lou Andreas-Salomé écrivit La Maison en 1904 mais ne le publia qu'à la fin de sa vie, en 1921. Il contient de très profondes expériences personnelles.
« Trois personnages en quête de liberté vivent dans une maison radieuse et sont liés entre eux par un amour que rien ne ternit. Pour Anneliese, femme du médecin Brandhardt, pour Gitta leur fille et surtout pour Balduin, leur fils, la liberté consiste à ne pas manquer la station des artistes, devant laquelle le train de la vie s'arrête si peu de temps. [...] Anneliese a renoncé à sa carrière de pianiste virtuose. Gitta, épouse de l'intuitif Markus, prendra en main sa propre existence. Le personnage le plus éclatant du livre est l'adolescent Balduin, portrait du jeune Rainer Maria Rilke. L'analyse profonde et subtile qu'en fait Lou Andreas-Salomé [...] accroît encore l'intérêt de cette marche vers l'indépendance. Le pays des artistes est pour tout le monde le pays de la liberté. Il convient de ne pas vivre hors de ses frontières. » N.C. -
Sara Salar nous plonge dans la vie d'une jeune Iranienne de la classe moyenne, au début des années 2000. Au volant de sa voiture, coincée dans les embouteillages de Téhéran, la jeune femme se livre à un monologue intérieur où l'intime croise le paysage social de la capitale. À travers une série de réminiscences qui s'entremêlent habilement au cours trivial du quotidien, elle dévoile peu à peu les tenants et aboutissants du drame qui se joue derrière ces heures apparemment banales. Entre le poids des conventions sociales et ses efforts pour occuper son fils à l'arrière de la voiture, la narratrice pense à Gandom, une de ses anciennes amies, opposée en tout point à elle par son audace et sa liberté d'esprit. Qu'est-elle devenue ?
Dans cette fiction réaliste mais à lire aussi entre les lignes, Sara Salar fait ressentir, avec une finesse inouïe, les différentes contraintes qui ont lentement dressé autour du personnage les murs d'une impasse. "Je me suis probablement perdue" a reçu le prix Houshang-Golshiri et est traduit dans plusieurs langues. -
Chanson pour bercer de grands garçons
Conceição Evaristo
- Des Femmes
- Fiction
- 6 Juin 2024
- 9782721012265
À cause de la couleur de sa peau, Fio Jasmin n'a pas pu jouer le rôle du prince dans la pièce théâtrale de son école. Des années plus tard, toujours marqué par ce souvenir, il met en oeuvre un parcours de grand séducteur. Marié, père de nombreux enfants dont certains qu'il n'a jamais connus
ni reconnus, il s'affranchit des limites sociales imposées aux
hommes noirs et entreprend de conquérir un royaume tout à lui. C'est par la voix des femmes qui ont croisé son chemin
qu'est racontée l'histoire de Fio Jasmin, en une mosaïque affectueuse et polyphonique, aimante et douloureuse.
À travers le personnage de Fio Jasmin, Conceição Evaristo
convoque magistralement les contradictions et les complexités qui entourent la masculinité dans notre contemporanéité, ainsi que leurs rapports à l'amour et à l'infidélité.
« Je capte comme témoin oculaire ou comme auditrice la dynamique de vies qui se confondent avec la mienne pour
une raison ou pour une autre. J'ai été l'une des femmes de Fio Jasmin, à l'occasion, peut-être. Fio Jasmin peut aussi incarner la figure d'un père qui m'a échappé comme affection. Non, le jeune homme ne m'est pas étranger, les femmes qui ont croisé son chemin non plus. Voilà pourquoi je m'efforce de toutes les écouter. Elles sont nombreuses, plurielles et diverses, les voix qui me poussent à l'écrivence. » C. E. -
Dans cette oeuvre d'introspection poétique, la grande écrivaine américaine Hilda Doolittle explore et revisite deux de ses relations marquantes à travers Mite, le personnage principal. Elle rencontre tout d'abord Josepha, dont elle tombe amoureuse. Après un voyage en Europe, les deux jeunes femmes sont séparées. Josepha se marie, Mite aussi, sans que celle-ci ne soit réellement satisfaite. Son époux Basil la trompe ouvertement, la laissant à sa solitude. Plus tard, nous assistons aux prémices des amours de Mite et Althea, à leurs errances dans la forêt et leurs réflexions sur leur place dans le monde. Traduit pour la première fois en français, "Portrait d'aujourd'hui" fait partie du cycle autobiographique de H. D. mais demeure une oeuvre en soi.
« Ce que nous livre H.D. dans son "Portrait", c'est aussi et peut-être surtout, à travers la description de l'intime autobiographique, la conquête d'une écriture libre, délivrée des canons du passé comme des injonctions factices d'une avant-garde déjà morte : une écriture enfin relâchée dans l'intensité d'un aujourd'hui. Le "Portrait d'aujourd'hui" selon H.D. est celui d'une création sororale qui permet au « Monde visible », dans lequel s'inachève le récit, d'advenir et de s'affirmer.» Antoine Cazé
« Un portrait, une peinture ? Aujourd'hui, on ne peut pas peindre comme on peignait hier. On ne pourra pas peindre
demain comme on peint aujourd'hui. Un portrait, une peinture ? Ne le peignez ni à la mode d'hier, passionnée et rigide, ni à celle que l'on s'imaginait hier pour après-demain, quadrillée, hachée, géométrique, prismatique. N'essayez pas de peindre la destruction que l'on imaginait hier pour après-demain, ni les canons de beauté d'hier. Essayez plutôt, de quelque manière que ce soit, de peindre un portrait d'aujourd'hui. » H.D. -
La discrète Maï est dévouée à son mari volage, à ses beaux-parents au caractère difficile et autoritaire, ainsi qu'à
ses enfants. Mais qui se cache donc derrière ce voile qui révolte tant sa fille Sounaina ? À travers ses yeux perspicaces, on découvre le quotidien de cette famille indienne et la toile d'images et d'événements centrée autour de Maï. Malgré les encouragements de Sounaina à s'opposer aux injonctions absurdes de l'ancienne génération, Maï, comme tant d'autres femmes effacées par l'autorité patriarcale, choisit de se sacrifier pour le bonheur familial et le respect des traditions. C'est dans le silence de Maï que se dévoile l'éloquence du faible, et dans son incommensurable vulnérabilité, sa force infinie.
« Les grands messieurs des histoires de Maman étaient toujours des imbéciles. Et dans les histoires plus longues qu'elle nous racontait, le pauvre faible innocent qu'on prenait pour un imbécile triomphait finalement. Qu'il y ait dans la faiblesse de l'innocent le potentiel de la victoire, nous l'admettions volontiers, mais sans y penser plus
que cela. » G. S. -
La présente édition rassemble pour la première fois en un seul livre l'ensemble des nouvelles écrites par Clarice Lispector au cours de sa vie, grâce au travail de son biographe Benjamin Moser qui a effectué de longues recherches au Brésil pour restituer leur chronologie et retrouver des textes demeurés jusque-là inédits.
On y retrouve donc les nouvelles des recueils suivants publiés par les éditions des femmes-Antoinette Fouque : La Belle et la Bête suivi de Passion des corps, traduit par Claude Farny et Sylvie Durastanti (1984) ; Liens de famille (1989) et Corps séparés (1993), traduits par Jacques et Teresa Thiériot (1989) ; des nouvelles figurant dans La Découverte du monde, recueil de chroniques traduites par Jacques et Teresa Thiériot (1995) ; Où étais-tu pendant la nuit, traduit par Geneviève Leibrich et Nicole Biros (1985). À cela, s'ajoutent dix nouvelles inédites traduites par Claudia Poncioni et Didier Lamaison.
« Dans ces quatre-vingt-cinq histoires, Clarice Lispector révèle, avant tout, l'écrivain elle-même. Des promesses de l'adolescence, en passant par l'assurance de la maturité, à la désagrégation d'une artiste tandis qu'elle approche de la mort - et qu'elle la convoque -, nous découvrons la figure, plus grande que la somme de chacune de ses oeuvres, qui est objet d'adoration au Brésil. [...]
De la première histoire, publiée alors qu'elle avait dix-neuf ans, à la dernière, découverte sous forme de fragments disparates après sa mort, nous suivons une vie entière d'expérimentation artistique au travers d'un large éventail de styles et d'expériences. [...] Sa littérature est un art qui nous fait désirer connaître la femme ; elle est une femme qui nous fait désirer connaître son art. Le présent ouvrage offre une vision des deux à la fois : un portrait inoubliable, dans et par son art, de cette grande figure, dans toute sa tragique majesté. » B.M -
Les répétitions et autres nouvelles inédites
Silvina Ocampo
- Des Femmes
- Fiction
- 20 Avril 2023
- 9782721011657
Ce recueil, composé de vingt-quatre nouvelles et de deux
courts romans inédits, explore les obsessions fécondes de
Silvina Ocampo. Le mystère des maisons et des jardins,
les cruautés et les artifices de l'enfance, la prédestination
d'un nom, les amours fantasmées se développent dans
une narration qui défi e les frontières entre le quotidien et
l'exceptionnel. Éprise de la magie imperceptible de chaque
jour, Silvina Ocampo instille dans le récit une dose de
vraisemblance sans jamais renoncer au fantastique. C'est
avec une grande liberté narrative qu'elle tisse une matrice
poétique aux dialogues singuliers.
Quelqu'un m'a demandé une nouvelle. Il y a des fois où une nouvelle sort naturellement de ma machine. Une machine
mystérieuse qui parfois se détraque, dont les lettres quittent leur place. Parfois un o s'élève comme un ballon au-dessus des autres lettres. Parfois un a reste obstinément au même endroit, inamovible. D'autres fois, les phrases se posent facilement sur le papier, elles correspondent à une idée ou à une sensation précise, comme si elles avaient vécu dans mon esprit, comme si elles y étaient nées et y avaient grandi. Elles s'imprègnent de l'air que je respire, des dialogues que j'ai eus. » S. O. -
La femme qui a tué les poissons et autres contes
Clarice Lispector
- Des Femmes
- Fiction
- 2 Décembre 2021
- 9782721009326
« Parce qu'au début et au milieu je vais vous raconter des histoires sur les animaux que j'ai eus, pour vous montrer que je ne pourrais pas avoir tué les poissons autrement que sans le faire exprès. J'ai bon espoir qu'à la fin de ce livre vous me connaissiez mieux et que vous m'accordiez le pardon que je demande pour la mort de deux "tyrougets" - c'est comme ça qu'on les appelait à la maison, "tyrougets". » C. L.
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« En écrivant, elle se dit qu'elle réussira à mieux comprendre - en interchangeant le personnage de Nana avec celui d'un garçon, peut-être, avec Dani ou Mits, par exemple, ce serait plus facile - ah non, ce ne serait pas plus facile. Elle devrait s'instruire davantage sur les corps et les émotions, comprendre pourquoi son ventre est serré, noeud de désirs et d'inquiétudes, elle les reconnaît bien, ils sont clairs ces mots, mais elle a peur de les exprimer. Ah, si elle pouvait courir, voler, se jeter sur le sable chaud d'une mer, écouter, éperdue, le bruit des vagues. Elle s'imagine les vagues et au-dessus, la montagne. » A. N.
Cristina traverse son adolescence dans les années 1980, durant la dernière décennie de la dictature roumaine. Élève dans un lycée de province, elle s'éprend d'une camarade de classe issue d'un milieu plus élevé et se découvre une passion pour l'écriture. Mais les diktats imposés par le régime lui barrent le chemin. Jeune adulte, elle s'efforce de naviguer entre les contraintes politiques, familiales et sociales qui pèsent sur les femmes. Elle essaie d'écrire, jonglant entre précarité, censure et autocensure. Avec un humour corrosif, les plus subtils rouages de l'oppression
sont mis à nu.
« Alina Nelega a chamboulé avec "Comme si de rien n'était" les habitudes littéraires roumaines par un sujet peu abordé jusque-là : l'homosexualité féminine. Placé dans un cadre historique précis, mais qui s'éloigne du souvenir des Roumains - la dernière décennie du « règne » Ceausescu
-, le livre se présente comme un arrêt sur image de toute la société roumaine. Il y est question de la fameuse Securitate, du contrôle de la sexualité par le Parti, de pénurie, de corruption, de relations interethniques en Transylvanie - où se déroule principalement la narration -, d'abus politiques, de révolte étouffée. Il y est question d'amour et de féminité
mais surtout de liberté. » F. C. -
Clarice Lispector travaille « dans l'imprécision blanche de l'Intervalle », entre la vie et la vie. Ce premier roman est l'aventure de Joana, fille d'une mère « pleine de pouvoirs et de maléfices », indépendante, obstinée, le diable en personne, tôt disparue, et d'un père lointain et distrait. Joana, c'est la légèreté, l'amour - cette force en elle qui démasque les faux-semblants -, la liberté « même si elle est peu de chose au regard de ce qu'elle désire et qui n'a pas encore de nom »...
Renoncement, passion, révélation, illumination, transformation. Ces mots qui pourraient paraître présomptueux ou maladroits, Clarice Lispector en use avec une assurance et une humilité confondantes. Le miracle est qu'ils nous apparaissent comme les seuls aptes à rendre compte de la quête qu'elle a poursuivie de livre en livre, celle d'une vérité qui jaillit de la réconciliation de l'intelligence et du corps.
« Elle était si vulnérable. Se haïssait-elle pour cela? Non, elle se haïrait plus si elle était déjà un tronc immuable jusqu'à la mort, capable de seulement donner des fruits mais non de croître à l'intérieur d'elle-même. Elle désirait encore plus : renaître toujours, couper tout ce qu'elle avait appris, ce qu'elle avait vu, et s'inaugurer dans un nouveau terrain où le moindre petit acte aurait un sens, où l'air serait respiré comme pour la première fois. Elle avait la sensation que la vie courait épaisse et lente en elle, bouillonnant comme une chaude couche de lave. » C.L.
Près du coeur sauvage, premier roman de Clarice Lispector, publié alors qu'elle n'a que 23 ans, la fait immédiatement connaître du grand public tandis que la critique salue la naissance d'une grande écrivaine, la comparant à Virginia Woolf et à James Joyce.? Pour sa cinquième édition, ce livre est réédité avec une nouvelle traduction en décembre 2018. -
« Et je veux capturer le présent qui, par sa nature même, m'est interdit [...].
Mon thème est l'instant, mon thème de vie. Je cherche à lui être pareille, je me divise des milliers de fois en autant de fois que d'instants qui s'écoulent, fragmentaire que je suis et précaires les moments - je ne me m'engage qu'avec la vie qui naît avec le temps et avec lui grandit : c'est seulement dans le temps qu'il y a de l'espace pour moi. [...]
La musique ne se comprend pas : elle s'entend. Entends-moi alors avec ton corps tout entier. Quand tu arriveras à me lire, tu demanderas pourquoi je ne m'en tiens pas à la peinture et à mes expositions, puisque j'écris rude et de façon désordonnée. C'est que maintenant je sens le besoin de mots - et c'est nouveau pour moi ce que j'écris parce que ma vraie parole est restée jusqu'à présent intouchée. La parole est ma quatrième dimension. [...] » C. L. -
Édition d'Ernesto Montequin
« Mais ses péchés à elle
étaient très différents,
aussi différents que les personnes sont différentes.
Sa mère, pure et joyeuse,
son père sombre et sévère,
sa cousine dévergondée et audacieuse,
sa nourrice saine et dévote.
Comment aurait-elle pu, dans cette liste
de péchés arbitraires, trouver le sien,
personnel et subtil,
si opposé aux manières de ses proches. »
S. O. -
Livre posthume, livre-testament certes, Un Souffle de vie est aussi un contrepoint fulgurant à tout ce que Clarice Lispector a publié de son vivant. Si les chroniques de La Découverte du monde révélaient certains de ses processus de création, ici ce sont des matériaux presque bruts, analogues aux « fusées » baudelairiennes, qui irradient toutes les questions angoissées que s'est toujours posées Clarice face à Dieu, au temps, au monde et à son histoire, aux êtres vivants ou inanimés.
Même si elle n'est pas saisie consciemment, l'approche de la mort aiguise ces interrogations : comment finalement résoudre l'énigme de toute création ? Qu'est-ce que la mort ? Imaginant un dialogue entre un auteur et la femme personnage à qui il donne « un souffle de vie », Clarice, entre ces deux miroirs, se dédouble à l'infini et, une dernière fois et à jamais, nous éblouit par tous les éclats de son écriture et finalement nous propose le mot « vie » comme réponse à nos propres questions. -
Deux adolescentes confrontées à la violence et à la misère, tentent de survivre dans le Brésil de la fin des années 70. Contraintes de quitter l'orphelinat, elles doivent retrouver leur mère absente à la vie chaotique. Elles sont livrées à elles-mêmes, terrorisées et affamées dans une ville sucrière où une pluie de cendres tombe sans relâche sur les habitants. Elles partent dans un long périple pour retrouver un père qu'elles n'ont pas connu. Proies faciles pour les prédateurs qui peuplent les routes, elles sont emportées malgré elles dans des situations risquées.
La vérité finira par se faire jour pour Smiley qui décidera de prendre sa vie en main. Dans ce roman - déclaration d'amour blessé -, chacune s'accroche à l'autre comme à une bouée de sauvetage. La rage de vivre n'a d'égal qu'une dignité émouvante.
À la fois roman social et roman d'initiation, "Saisons des feux" s'inscrit dans des problématiques très actuelles, à l'intersection de l'écologie et des différentes oppressions subies par les filles et les femmes, les personnes racisées et les personnes en situation de précarité. -
En Roumanie, sous la dictature de Ceau?escu, la jeune Maïa se retrouve impliquée dans une enquête sur un avortement illégal. C'est elle qui a trouvé le petit corps inerte dans les douches de l'hôpital communiste, îlot entre sexe et mort, dans lequel elle travaille comme instrumentiste et où elle
rêve d'un ailleurs, là-bas, de l'autre côté du mur. Dans un second scénario, Maïa, exilée, travaille dans la maison médicale suisse d'un canton catholique, dont les règles strictes et impénétrables l'entraînent vers une autre impasse... Sur le mode du miroir, "Complaisance" reflète deux hypothèses de vie du même personnage, et met face à
face deux mondes différents, celui de l'Est et celui de l'Ouest, chacun exigeant, à sa manière, conformité, concession... En un mot : complaisance. C'est avec un réalisme cru, mais aussi beaucoup d'humour et d'acuité intellectuelle, que Simona Sora signe ce portrait désillusionné de deux sociétés que tout semble opposer mais qui sont finalement assez semblables, où l'hypocrisie ne laisse que peu de place à la vérité.
Avec le concours de l'Organisation internationale de la francophonie. -
Récit à la première personne d'inspiration autobiographique, Gina est la chronique d'une expérience de passage à l'âge adulte, tissée à partir des événements plus ou moins truculents qui ont jalonné la vie d'une jeune Catalane, de son village natal du delta de l'Èbre (« dix mille habitants et une centaine de milliers de moustiques ») aux nuits branchées de Barcelone. Lorsque la maladie survient, tout bascule : sclérose en plaques. Mais c'est sans compter sur son énergie vitale et le regard qu'elle porte sur elle-même, lucide, souvent cru, pertinent et furieusement ironique. Au bout d'un chemin fait tout à la fois de la recherche d'elle-même et d'un désir d'enfant, il y a peut-être l'amour d'une autre femme...
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« Tout triste rebelle que je suis, j'attribue des formes informes aux miettes de pain éparpillées sur la table. Alors que j'apprécie les produits de la terre, il n'y en a pas beaucoup chez moi, je me nourris pour ainsi dire de petites bricoles. Pourtant sans eux, je ne serais pas ici, sur cette colline de Lisbonne [...]. Après avoir quitté les terres de mon grand-père et m'être établi à Lisbonne, à Sagres, et puis dans le monde, c'est ici que je suis revenu. Qui suis-je sans les ruines des villes humaines et sans les bribes de mon existence ? Qui suis-je sans ces histoires, mes décombres ? [...] Les pièces de monnaie que j'ai dans la poche nourrissent à peine mes rêves. Les restes d'un travail presque esclave, des voyages où jadis nous autres Portugais nous étions passés maîtres. » N. P.
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Un apprentissage ou le livre des plaisirs
Clarice Lispector
- Des Femmes
- Fiction
- 22 Octobre 2020
- 9782721008305
Lori est institutrice, Ulysse, professeur de philosophie. Leurs rendez-vous s'inscrivent dans un quotidien banal. Mais elle est Lori-Lorelei, une sirène, et lui est le sage Ulysse qui vit à distance, voyageur immobile qui attend la femme, l'observe à chaque étape de sa quête du monde et d'elle-même. À partir d'éléments autobiographiques et dans un climat de rituel initiatique, l'auteure tisse le fil d'une histoire d'amour insolite, invitant le lecteur à se dépouiller de ses propres images pour entrer dans ce langage destiné à retrouver, à inventer l'autre.
« Et maintenant c'était elle qui sentait l'envie de rester sans voir Ulysse, un certain temps, pour pouvoir apprendre, seule, à être. Déjà deux semaines avaient passé et Lori ressentait un manque si grand que c'était comme une faim. Qui ne passerait que si elle mangeait la présence d'Ulysse. Mais parfois le manque était si profond que la présence, calculait-elle, serait insuffisante ; elle voulait absorber Ulysse tout entier. » C.L. -
Mère depuis quelques heures, une femme observe son
nouveau-né depuis son lit à la maternité. Comment porter
sa fille, si fragile, sans la casser ? Comment vivre avec cette
nouvelle charge ? Donner naissance n'est pas le point d'arrivée mais le début d'un apprentissage. Les journées s'organisent au rythme de l'enfant et des soins prodigués à ce petit être encore méconnu. Entre la fatigue, les nouvelles difficultés et l'amour inconditionnel qui la lie à sa fille, la mère peine à trouver son équilibre. La nature semble être sa seule compagne dans cette recherche de soi. Après sa venue au monde en tant que mère, elle renaît en
tant que femme.
Virginia Helbling refuse tous les lieux communs sur la maternité pour porter un roman vif, sincère, lumineux et singulier, sur la charge mentale.
« Des générations silencieuses défilent, les visages des grand-mères que j'ai vues sur des photographies. Un fil de l'histoire remonte à la surface du fin fond de ma conscience et je me retrouve soudain au croisement entre celles qui m'ont précédée et celles qui suivront : livrée à l'histoire, une place rien qu'à moi. Avec ma fille, je suis née un peu moi aussi. » V. H. -
Comment sont nées les etoiles ; douze légendes brésiliennes
Clarice Lispector
- Des Femmes
- Fiction
- 22 Octobre 2020
- 9782721008183
« Le destin de l'enfant, c'était de naître. On entendait, comme venue du coeur de la nuit silencieuse, cette musique aérienne que chacun de nous a déjà entendue et dont est fait le silence : extrêmement douce et sans mélodie, mais composée de sons qui pouvaient devenir mélodieux. Flottante, ininterrompue. Les sons comme quinze mille étoiles. La petite famille captait la plus élémentaire vibration de l'air - comme si le silence parlait. » C.L.
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Paru au Brésil en 1949, La ville assiégée est le troisième ouvrage publié par Clarice Lispector.
L'histoire se passe dans les années 1920. Une jeune fille, Lucrécia, assiste au développement industriel du faubourg où elle habite. Apprentissage de la ville et de soi, dans la recherche d'un équilibre qui ne se trouvera d'abord que par la domination des objets. Lucrécia, du regard, affronte la réalité, assiège la ville avec la complicité des chevaux. Elle en épouse la forme pour réduire à merci les hommes dont le pouvoir n'est que professionnel. La ville assiégée est un roman surprenant et maîtrisé, où l'apparente chronologie est constamment brisée dans la confrontation du passé, du présent et de l'avenir et où les tableaux d'époque sont transcendés par des visions mythologiques. Fable réaliste où la parole à la fois lente, obstinée et frémissante, permet de trouver l'épiphanie, de résoudre l'ambivalence où se débat tout être vivant, humain ou animal. -
Paru en 1946, "Le lustre" est le deuxième ouvrage publié par Clarice Lispector. Elle a vingt ans. Roman d'initiation, il décrit le parcours douloureux et bref d'une adolescente, Virginia, élevée à la campagne dans le silence d'une famille et d'une demeure décadentes et qui va faire son éducation sentimentale à la ville. C'est l'initiation au mystère des choses, à la difficulté d'être, la découverte du monde dans ses plus intimes et fugaces manifestations, par la sensation et surtout le regard. C'est aussi l'initiation à la parole. Le Lustre est un livre fondamental dans l'oeuvre de l'auteure. Elle nous y donne presque à l'état brut les prémices de sa vision du monde, gangues et pépites, les péripéties du parcours de l'héroïne préfigurant l'itinéraire de la romancière.
Dans ce livre matrice où l'écriture fixe la mouvance des choses tout en étant entraînée par elle, s'ébauchent des personnages, des scènes, des situations qui prendront des traits plus accusés dans les livres ultérieurs. -
Bénie soit ma langue : Journal intime
Gabriela Mistral
- Des Femmes
- Fiction
- 24 Octobre 2024
- 9782721013415
Gabriela Mistral, grande écrivaine chilienne du XXe siècle, enseignante, poétesse, diplomate et voyageuse, fut en 1945 la première femme d'Amérique latine à recevoir le prix Nobel de littérature. Elle a toujours pris le temps, au cours de sa vie, de consigner ses pensées matérielles et personnelles, ce qui nous permet aujourd'hui cette plongée dans son intimité et ses préoccupations quotidiennes. De l'amour passionné à la douleur profonde en passant par la maternité et la créativité artistique, Gabriela Mistral partage les émotions complexes qui ont façonné sa vie et son oeuvre. Lettres, notes, réflexions inscrites sur des carnets construisent ce récit kaléidoscopique de la vie de l'autrice mais attestent également de son attention toujours accrue à l'actualité politique du Chili. La langue intense et puissante de cette immense femme de lettres se déploie en une toile aux ramifications multiples que l'autrice tisse avec son incandescence habituelle.
« J'ai eu une enfance pauvre et heureuse dans les vallées de ma cordillère. Le paysage, si l'on peut parler de paysage quand on vit immergée dans une gorge montagneuse, offrait de violents contrastes : une centaine de collines et plus encore, une sorte de bouillonnement rocailleux, sauvage et coloré, et en contrebas, sans transition, une étendue idyllique de vignes, de figuiers et de vergers.
Ce contraste entre âpreté et douceur, on dit qu'il est en moi et je veux bien le croire, et il ne me déplaît pas à cause d'une certaine vanité : j'aime retrouver en moi les traits de mes lieux, de mes origines. » G. M.